Mohamed Abdeljlil avait obtenu son visa, il portait une belle casquette de laine mouchetée, un jean et une jolie veste noire. Élégance, simplicité. Il tirait derrière lui une petite valise à roulettes à moitié pleine et partait comme il le disait pour toujours en direction de Zaragoza. Fils de métal entrelacés, cordes tendues noires de graisse, hublots, petit œil sur les vagues et l'écume, Euroferrys Atlantica. Je respire l’odeur du vent salé. Je me sens vivre quand je sens cette odeur d’horizon bleu. Mohamed avait l’œil pétillant et soif de son nouveau monde, de sa future nouvelle vie. Et moi j’étais là, planté là avec mes racines courtes et mes expériences nouvelles. Celles que je devrai maintenant concilier avec ma vie a venir, ma vie en France. Je repensais à cette rivière des premiers temps, cette rivière omniprésente que j’avais redécouverte sous le nom de vie à Oujda. Cette rivière que j’avais eu dans un premier temps l’impression de descendre à contre courant. Cette rivière qui m'était apparue dans un premier temps comme un obstacle. Celle qui m’avait conduit à Fes et celle qui me ramènerait dans les bras de ceux que j'aime. Je réalisais aussi que ces derniers temps, la peur du retour en France s’était traduite par de la colère face à ce pays que j’aimais. La peur du confort matériel au-delà des relations humaines fortes, au-delà de la chaleur. La vie sans artifice, sans rôle à tenir, être soi au-delà des apparences et des appartenances, être soi dans le respect de la différence et dans le partage. Être intègre. Être soi même à travers la diversité et se nourrir de cette France de tous les horizons. Être soi dans le débat d’idée sans se faire intégriste politique, religieux, culturel. Mais en essayant de concilier ce petit tout de tous les jours dans le respect de l’autre et dans l‘intimité de soi. Ce bateau de la nuit avançait dans ce grand manteau de velours. Il ne laissait apparaître au loin que les dernières petites étincelles de vie, puis l’écume, les vagues, les minutes et les secondes rythmées sur le tempo électrique de mon coeur se mirent alors à retourner le grand sablier du temps et le dernier volet de mon voyage s’ouvrait
ACT II
sur un parfum de branche de Jasmin collée entre deux feuilles de carnet Moleskine. Sylvaine, son homme et le terroir, ruelles blanches et ensoleillées, maquillage épais de transsexuelle ou de travesti à la Almodovar et cette forte impression d’odeur de sexe lourd et poisseux rentrant de leur nuit et me raccompagnant devant la fondation Picasso. Ce petit voyage en Vespa accroché à la doudoune de ce compagnon de la nuit direction gare routière, Cette omelette foireuse à cinq heures du matin accompagnée de bière avec des punks déchirés jusqu’à la moelle. La chambre tropicale. Le Christ en sang à deux pas des sex shops et des tapis roulants, des publicités de prévention cocaïne, des seins orientés vers le ciel et des corps aiguilles allongés sur le sable fin et chaud qui suivent au rythme de la journée le lever et le coucher du soleil. Décalage horaire, deux heures, décalage social, décalage. Coule fleuve, coule, moi je fais une pause, assis sur la berge, le temps de reprendre conscience. Malaga me fouette la gueule. Malaga est un crochet du droit à quelques kilomètres des côtes africaines, Malaga est une vague dans le fleuve qu’était ma vie à Fes. Je bois la tasse comme prévu. Mais maintenant je sais comment prendre les choses. Pour mon retour en France. Je ne revivrai pas deux fois Moreau. J’avais l’habitude de vivre au court de mes voyages des expériences fortes et des rencontres uniques pour la simple et bonne raison que je prenais des risques. J’étais à travers le fait d’être seul, l’unique maître à bord de mon navire et je lui donnais les directions que je voulais lui donner avec comme seul maître mon intuition, ma bonne étoile, et mes mots. La France serait l’atterrissage de ce voyage et il prendrait la forme que je voudrais lui donner. J’avais appris à sentir le regard des hommes, à sentir la poudre et le danger d’une rue, d’une proposition. J’avais appris à courir, j‘avais appris à dire oui j’avais appris à dire non.
J’étais ici dans un premier temps sans repère. En décalage avec ma vie en Médina.
Et je voyais cette Belle Andalouse, terre de soleil terriblement érotique, carrefour du monde arabe et de l’Europe. Boule de glace fondant au soleil. Alignement de poussettes sur les trottoirs. Palmiers, dattiers et verre poli multicolore arrondi par le ronron régulier des vagues. Crabes secs, pinces, odeurs de poisson, vin rouge limonade glacée. Trompette, militaire et religion, légions jonglant avec leurs flingues, Picaros, flagellations, confrérie, argent. Art, architecture, et bien d’autres choses mais je n’arrivais pas à toucher cette chaleur, cette pudeur, cette âme omniprésente que l’on ressent lorsque l’on fait quelques pas en médina. Je n’y arrivais pas et Malaga fut une belle expérience, celle des retrouvailles et du premier retour
sur un parfum de branche de Jasmin collée entre deux feuilles de carnet Moleskine. Sylvaine, son homme et le terroir, ruelles blanches et ensoleillées, maquillage épais de transsexuelle ou de travesti à la Almodovar et cette forte impression d’odeur de sexe lourd et poisseux rentrant de leur nuit et me raccompagnant devant la fondation Picasso. Ce petit voyage en Vespa accroché à la doudoune de ce compagnon de la nuit direction gare routière, Cette omelette foireuse à cinq heures du matin accompagnée de bière avec des punks déchirés jusqu’à la moelle. La chambre tropicale. Le Christ en sang à deux pas des sex shops et des tapis roulants, des publicités de prévention cocaïne, des seins orientés vers le ciel et des corps aiguilles allongés sur le sable fin et chaud qui suivent au rythme de la journée le lever et le coucher du soleil. Décalage horaire, deux heures, décalage social, décalage. Coule fleuve, coule, moi je fais une pause, assis sur la berge, le temps de reprendre conscience. Malaga me fouette la gueule. Malaga est un crochet du droit à quelques kilomètres des côtes africaines, Malaga est une vague dans le fleuve qu’était ma vie à Fes. Je bois la tasse comme prévu. Mais maintenant je sais comment prendre les choses. Pour mon retour en France. Je ne revivrai pas deux fois Moreau. J’avais l’habitude de vivre au court de mes voyages des expériences fortes et des rencontres uniques pour la simple et bonne raison que je prenais des risques. J’étais à travers le fait d’être seul, l’unique maître à bord de mon navire et je lui donnais les directions que je voulais lui donner avec comme seul maître mon intuition, ma bonne étoile, et mes mots. La France serait l’atterrissage de ce voyage et il prendrait la forme que je voudrais lui donner. J’avais appris à sentir le regard des hommes, à sentir la poudre et le danger d’une rue, d’une proposition. J’avais appris à courir, j‘avais appris à dire oui j’avais appris à dire non.
J’étais ici dans un premier temps sans repère. En décalage avec ma vie en Médina.
Et je voyais cette Belle Andalouse, terre de soleil terriblement érotique, carrefour du monde arabe et de l’Europe. Boule de glace fondant au soleil. Alignement de poussettes sur les trottoirs. Palmiers, dattiers et verre poli multicolore arrondi par le ronron régulier des vagues. Crabes secs, pinces, odeurs de poisson, vin rouge limonade glacée. Trompette, militaire et religion, légions jonglant avec leurs flingues, Picaros, flagellations, confrérie, argent. Art, architecture, et bien d’autres choses mais je n’arrivais pas à toucher cette chaleur, cette pudeur, cette âme omniprésente que l’on ressent lorsque l’on fait quelques pas en médina. Je n’y arrivais pas et Malaga fut une belle expérience, celle des retrouvailles et du premier retour
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