"Lorsqu'un seul homme rêve, ce n'est qu'un rêve. Mais si beaucoup d'hommes rêvent ensemble, c'est le début d'une nouvelle réalité." HUNDERTWASSER

mardi 28 avril 2009

Yas Oloulou

Je règle mes mots sur la rythmique du son que j'ai dans les oreilles, un tempo, une harmonie, un battement de cœur ou des pas. Je suis sur Searching for the space Monkey de Chinese Man. Et je me sens d'attaque. Mon corps balance de droite à gauche, comme une pendule. Comme une pulsation. Tempo. Mon seul ennemi, le temps. J'ai pris le temps hier de regarder mes posts. De les relire, comme j'ai l'habitude de feuilleter mes carnets, mes dessins, relire mes notes. Au Maroc, j'ai découvert la chaleur humaine et l'empreinte. L'empreinte du sacré sur l'enceinte Médina. J'ai découvert ici deux mondes, celui des hommes et celui des femmes. La souffrance et la liberté, mais la liberté au sens de quête. Une liberté qui prend réellement du sens dans la lutte et le fait d'être, dans le fait de se positionner face aux autres et dans le respect. Au Maroc j'ai découvert l'intégrisme inconscient celui qui te vend l'Islam comme un kilo de loubia, le "Ce serait quand même bien que tu deviennes musulman avant de rentrer". En achetant quelques pâtisseries une jeune demoiselle me demande en mariage tout en m'offrant un Kaab Laghzal que je déguste avec plaisir. Mon cœur est pris et mes lèvres sucrées se referment sur un je suis désolé mais je pourrai par contre revenir faire mes courses chez toi avec plaisir. Elle sourie, ça faisait peut-être trois minutes que je l'avais rencontrée pour la première fois de ma vie et lorsque je lui ai dit que j'envisageais mon avenir à Fes, elle s'est comment dire, refermée comme une coquille de noix. Sucre. Caramel. Tempo. Temps mon seul ennemi. Je suis sur Douala Paris de Kraked Unit et pour tout vous dire mon siège n'est pas plus confortable que ça alors ce post sera certainement court enfin, on verra. J'ai une envie forte de plonger mes pieds dans le sable du désert et sentir chaque grain entre mes orteils, je veux être léger. Me sentir grain de sable, me sentir grain de poussière. J'aime l'odeur de la viande saignante sur les étalages de Rcif, le poisson qui pue arrosé quand on y pense et les nuages de mouches quand la chaleur se pointe. J'aime les yeux des jeunes filles qui après t'avoir dit bonjour te demandent un bonbon, une main dans leurs cheveux, un sourire au revoir. La vie quoi dans toute sa simplicité. Pouvoir offrir un bonbon sans être aux yeux des autres un monstre. J'aime les étagères de pots chez l'herboriste, mues de serpent, épices, anis étoile, palette de couleurs, santè, magie blanche magie noire. Et mon cœur bat pour cette ville, à chaque pas je le sens battre ce cœur qui ne demandait que ça, prendre des coups au lieu de ronfler sous un manteau noir. Prendre des coups d'émotions que ce soit beau laid triste émouvant spirituel. Juste sentir son cœur et se sentir vivre et non pas accroché comme une marionnette à quatre fils. J'aime cette petite montée qui tout d'un coup s'ouvre sur la Qaraouiyine quand on descend talaa kbira, tout d'un coup on peut de nouveau respirer, ici un homme passe sa journée à dire Nougat, nougat de Montélimar et son nougat prend le soleil du matin au soir. Balek andek le cheval, la mule, parfois des ânes chargés comme pas possible traversent entre les touristes et les Fassi pour alimenter les échoppes, les ateliers, les cafés. J'aime m'asseoir près du four au Hammam et regarder près du feu les hommes alimenter cette petite caverne creusée sous le bâtiment. J'avais passé une après-midi d'hiver une fois avec un homme comme ça et ça avait été un moment sacrément fort. J'aime cette ville pour ce tout de tous les jours. Radio Medina sur les terrasses, les femmes en réseau secret extrêmement bien organisé se rejoignent tout en étendant le linge ou boire un café entre elles, pour diffuser les petites informations du jours. "Tu sais que telle personne n'est pas bien, il a redoublé sa dernière année!" Et les hommes font de même aux terrasses de café, ils crachent leur venin avant de parler d'amour. Que c'est beau, que c'est vrai. Mélancolie de l'impossible à dépasser. J'aime l'odeur des pétales de rose. Me rafraîchir avec de l'eau de fleur d'oranger. Le mélange d'odeurs, le crottin, le tabac, le parfum musqué d'une silhouette voilée, l'odeur des poubelles, de la boue, du plâtre, Coco Mademoiselle, le hena, la viande qui grille, mes aisselles qui puent, le café, le thé à la menthe, les pâtisseries, le sucre, le caramel, les amandes grillées, le pruneau chaud, odeur de poule, queue de paon, viande daubée et viande fraîche, coulée de sang ruisselant entre les dalles de la rue, savon noir, cuivre rouge. J'aime chacune de ces ruelles pour ce qu'elle vient chatouiller au fond de moi, l'amour, la curiosité, l'envie de découvrir et de ne pas me mettre de frontières. J'aime le jardin Jnan Sbil, les odeurs fortes, la tannerie Chouara. Mes pas me conduisent sur la rive andalouse. Puis je goute, la ville blanche des Mérénides Fes Jdid, le Mellah. Il n'y a pas vraiment d'explication, il y a des villes, des lieux, un espace comme ça qui du jour au lendemain semblent évident alors on se dit "Ben c'est celui là" et alors on pose le temps d'un tour de cadran ses bagages mais mon seul ennemi c'est le temps et ses aiguilles, pour l'instant je dois juste les observer, je n'ai pas vraiment le choix, si je veux revenir un jour.

Aucun commentaire: